Avenant 43 : développer le management des compétences dans la branche de l’aide, de l’accompagnement, des soins et des services à domicile : l’opportunité de l’avenant 43

Interview d’Hélène Bayer, Directrice de l’innovation au sein d’Anjou Accompagnement par Christophe Legeay, président de Peps Compétence.

Bonjour Hélène,

Tout d’abord qui es-tu et peux-tu nous présenter Anjou Accompagnement et Idée Compétences ?

Idée compétences est une association de formation et de conseil créée par Anjou Accompagnement et ADT44, membres du réseau UNA, en mai 2021. Nous souhaitions développer une offre de formation spécifique sur des thématiques que nous ne trouvions pas dans celles de nos prestataires habituels de formation. Mais c’était également une volonté de valoriser l’expertise des métiers de la relation et de l’autonomie à domicile par l’innovation. Idée Compétences est certifiée Qualiopi depuis décembre 2021 !

Directrice de l’Innovation à Anjou Accompagnement depuis 2020, une partie de mon temps de travail est mis à disposition d’Idée Compétences pour piloter les différents programmes, construire l’ingénierie de formation ou animer les formations. Idée Compétences dispose également d’une équipe de formateurs, tous professionnels experts du domicile et de la relation d’aide, salariés d’Anjou Accompagnement ou d’ADT44. Tous ceux qui contribuent à la construction ou à l’animation de formation ont été formés à la posture de formateur par PEPS Compétences. C’est également PEPS Compétences qui nous a accompagné collectivement à la certification.

L’avenant 43 vient chambouler la classification des emplois mais qu’apporte-t-il aux entreprises de la branche ?

C’est vrai que l’avenant 43 chamboule nos modes de fonctionnement. Sa mise en place a nécessité un travail collectif de l’équipe de direction avec un rôle important confié à Mireille Besnard, Responsable des ressources humaines qui anime la démarche interne.

En effet, au-delà de la rénovation de la classification des emplois, l’avenant 43 revalorise les rémunérations conventionnelles pour éviter l’immersion de certaines grilles de rémunération sous le SMIC. Mais, pour les structures de la Branche de l’aide et du soin, l’avenant 43 c’est aussi l’introduction de la notion de parcours professionnels avec un élargissement des effets de reconnaissance des compétences. C’est un changement profond qui amène à interroger les pratiques managériales dans une dynamique de management des compétences.

En quoi l’avenant 43 est-ce une opportunité pour les salariés ?

Le point le plus marquant pour les salariés réside dans la revalorisation des rémunérations conventionnelles. Cette revalorisation s’appuie sur la reconnaissance de leurs pratiques professionnelles et de leurs compétences. Avant l’avenant 43, la question des compétences était déjà un axe de progrès important. Désormais pour les salarié(e)s, les compétences sont davantage prises en compte et ont des impacts sur leurs parcours. L’ancienneté et le diplôme restent des éléments de valorisation mais nous pouvons également concevoir des parcours professionnels différents. Nous pouvons désormais imaginer des évolutions de carrière qui tiennent compte des compétences. C’est une réelle opportunité.

Ces parcours professionnels peuvent donner lieu à des évolutions dans le métier, pas uniquement des augmentations de la rémunération, même si la question de la reconnaissance financière reste une nécessité. En parallèle, la question du financement de l’avenant reste une réelle question qu’il faudra examiner dans le temps.

Et pour les employeurs, est-ce aussi une opportunité ? Et comment avez-vous procédé pour mettre en place l’avenant 43 ?

L’avenant 43 est venu renforcer notre démarche autour des compétences et de l’autonomie des professionnel(le)s. C’est pourquoi nous avons choisi de ne pas attendre et d’appliquer dès octobre 2021 les repositionnements et les augmentations de salaires. La convention prévoyait un délai maximum de 2 ans (octobre 2023) pour réaliser le positionnement des collègues éligibles à l’échelon 3. Anjou Accompagnement a souhaité mettre en œuvre une démarche dès le début de l’année 2022. Ces entretiens ont lieu en mars 2022 avec un effet rétroactif à octobre 2021 en cas de validation. C’est un engagement fort de l’association.

L’avenant 43 ouvre des opportunités dans la manière de recruter, mais aussi dans l’élaboration des parcours de formation et d’intégration. Il nous a permis de revoir notre processus d’évaluation. Nous avons choisi d’associer à différents niveaux l’ensemble des acteurs de l’association dans la démarche.

Bien sûr, les représentants du personnel ont été consultés et associés lors des différentes phases de la préparation du projet, la construction des fiches de postes, les grilles d’auto-évaluation des compétences et lors des commissions de recours si nécessaire.

Les salarié(e)s ont pu participer à des réunions d’information sur l’avenant 43, animées par la Responsable des Ressources Humaines en présentiel ou en visio sur les différents sites de l’association. Chaque salarié(e) a reçu sa nouvelle fiche de poste et la grille d’auto-évaluation des compétences. Les salarié(e)s éligibles à l’échelon 3 ont été invitées à un entretien de positionnement. Pour aller plus loin, nous leur avons proposé des ateliers de préparation aux entretiens de positionnement.

En parallèle, l’ensemble des coordinatrices/teurs a bénéficié d’une formation sur 4 jours sur le management des compétences construite en partenariat avec Peps Compétence et comprenant :

  • L’appropriation de la notion de compétences, de l’avenant 43 et du processus mis en place au sein d’Anjou Accompagnement,
  • La conduite de l’entretien de positionnement,
  • L’élaboration et l’accompagnement des parcours professionnels,
  • Mais aussi une réflexion globale sur la manière d’appréhender les impacts de l’avenant 43 dans le management quotidien avec l’élaboration collective de bonnes pratiques concernant le recrutement, l’intégration, l’organisation de l’activité, l’évaluation et l’entretien professionnel.

Pour garantir l’équité, nous avons mis en place des commissions d’harmonisation qui mobilisent les coordinateurs SSIAD et SSAD pour les candidat(e)s à l’échelon 3. Ces commissions doivent permettre d’aboutir à construire collectivement des règles équitables. Cela nous permet de pouvoir harmoniser les positionnements et faire évoluer nos outils en fonction des retours d’expérience. Cette commission d’harmonisation n’a pas vocation à perdurer mais permet à chacun de se caler et de s’ajuster sur un fonctionnement qui reste nouveau.

As-tu pu en mesurer l’impact sur les équipes et sur le management ?

C’est encore tôt pour le dire, mais je crois que ce qui est marquant, c’est la réflexion qui émerge concernant les collègues qui seront échelon 3. En effet, l’échelon 3 est destiné aux collègues qui font preuve d’une expertise sur l’ensemble de leurs compétences mais également d’une capacité à transmettre ces compétences. Ils et elles doivent être de véritables ressources pour les équipes et pour les coordinatrices/teurs.  Cela nécessite de mettre en place de nouveaux modes de fonctionnement et de nouvelles pratiques. Et c’est très excitant de voir cela émerger !

Qu’avez-vous mis en place pour accompagner ce changement ?

C’est vrai que nous aurions pu nous contenter d’appliquer les modalités prévues dans l’avenant, mais nous avons souhaité aller plus loin car cette évolution s’inscrit pleinement dans la continuité de nos différents projets.

En effet, nous sommes engagés depuis 2 ans dans la mise en place d’équipes semi autonomes tant pour nos services d’accompagnement que de soins. Ces équipes sont appelées TEAM pour Travail d’équipe et Accompagnement des Métiers. Si je devais résumer l’esprit des TEAM ce serait : de l’autonomie au service de la qualité du travail et de la qualité des accompagnements. Cette démarche a favorisé les initiatives, suggestions et mises en place de solutions pour une meilleure prise en charge des bénéficiaires, la qualité des interventions, l’organisation du travail, le recrutement et l’intégration, la coopération… Les résultats sont très encourageants : 74% des collègues mobilisées dans le projet ont le sentiment d’être moins isolées dans leur travail depuis qu’elles échangent en TEAM ! Et 75% d’entre elles estiment que ce fonctionnement leur permet de rendre un meilleur service aux usagers…

L’avenant 43 permet de reconnaître et de développer les compétences mises en œuvre et de mieux associer les salariés dans l’élaboration de leur parcours en lien avec leurs appétences et les projets de l’association. En cela c’est en totale cohérence avec la dynamique des TEAM.

Et si c’était à refaire, quels retours d’expérience pouvez-vous partager ?

Nous avons choisi de ne pas seulement appliquer l’avenant 43 mais également, d’en faire un outil de transformation : cela a supposé d’associer l’ensemble des acteurs car la démarche et l’avenant ont besoin d’être bien expliqués. La pédagogie, l’accompagnement demandent beaucoup de temps mais nous avons volontairement fait le choix d’impliquer pour responsabiliser chacun à cette nouvelle logique de parcours professionnels.

L’un des enjeux forts a également été de former l’ensemble des coordinatrices/teurs SAD et SSIAD. Ce temps de formation en commun a été l’occasion de s’entendre collectivement sur la méthode, sur les concepts, tout en permettant de relativiser l’exercice de l’entretien de positionnement. Cela a procédé d’une certaine forme d’acculturation au management par les compétences qui bouscule les pratiques.

Pour finir, il me semble qu’il est précieux de rester flexible dans la démarche car pour appréhender la nouveauté, il est primordial de rester souple afin de pouvoir construire et faire évoluer le changement en fonction des évolutions de l’association, des contraintes du secteur et du marché du travail. Cela permet de garder en tête qu’il n’est pas question d’accepter le changement mais de choisir de changer en adaptant nos pratiques à notre environnement.

Hélène Bayer est Directrice de l’innovation au sein dAnjou Accompagnement et d’Idée Compétences.

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